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Carnets d'Egypte

Insécurité routière - Burkina Faso

12 Octobre 2014 , Rédigé par Julien V. Publié dans #Improvisation, #Burkina, #Multiplume, #Ouagadougou

Ce récit nous vient de Julien qui, lui, a choisi de faire sa 3A au Burkina Faso. Souhaitez lui la bienvenue, soyez gentils avec lui, et n'hésitez pas à écrire aussi si l'envie vous en prend...

Comme dans beaucoup de pays d’Afrique, l’insécurité routière n’est pas un vain mot au Burkina. Le plus dangereux, paradoxalement, n’est pas la circulation en brousse (où les routes sont de mauvaise qualité), mais en ville et sur les axes principaux du pays (goudronnés !).

Tout le monde reconnaît qu’il y a trop de morts. On dit que 4 personnes décèdent par jour à Ouagadougou à cause de la circulation. Ce chiffre est peut-être sous-évalué.

Et pourtant, rien n’y fait. Tous les acteurs qui devraient s’occuper de la sécurité routière (les automobilistes en premier) abandonnent leurs responsabilités. La majorité circule en moto, et sans casque bien sûr, même ceux qui pourraient s’en payer un. Les rares voitures, les gros 4*4 n’ont pas de ceintures de sécurité (ou n’en n’ont plus). Les gens chargent à mort les pick-up, les bus, et même parfois les motos de multiples bagages.

Il ya donc déjà la question du matériel. Les taxis-verts, bien souvent, ont trop servi. Usés jusqu’à la moelle, Ils ploient sous le poids des 3, 4, 5, 6, 7,… personnes qui s’y entassent. Les portières sont cassées, le coffre n’est retenu que par une sangle (adieu le système original de fermeture !) ; et les roues sont dans une bizarre position de strabisme convergeant, qui donne à la base de la voiture un aspect pyramidal assez proche de Gizeh. Les camions surchargés ont des pneus mal gonflés, et tanguent de gauche et de droite. Les motos tombent en panne. Quand les freins dysfonctionnent, on rentre dans son voisin pour s’arrêter. Joli concert de klaxons en perspective.

Il aurait fallu nous voir, assis sur une chaise double, sur la plateforme du pick-up, nous retenant avec peine quand le chauffeur poussait un peu trop fort l’accélérateur ou le frein, ou donnait un coup de volant. Nous mangions le sable et le vent. Et le chauffeur, bien sûr, roule à 70-80 là où il devrait rouler à 30-50 (en ville) et à 100 en brousse (vitesse conseillée = 50). Bien sûr, au milieu de cette voie expresse, pullulent des gendarmes couchés, comme si ça n’était pas suffisant.

Mais au lieu que cela n’effraie personne, les habitants trouvent ça réjouissant. Au passage d’un policier, en tant que bons européens, on craint l’arrêt, le contrôle des papiers et du permis de celui qui a osé laisser faire ça. Que nenni ! On trouve à la place un amical salut de la main, accompagné d’un grand sourire pour ces blancs qui vivent l’aventure (et quelques sueurs froides). Plus loin on nous acclame même. Ils sont contents de voir des blancs non prétentieux s’intégrer dans la couleur locale. On n’est peut-être pas en sécurité, mais on est chaleureusement accueilli.

Car le problème est bien-là, les automobilistes sont fous. Les feux rouges ? On passe s’il n’y a personne ! Doubler par la droite ? Pourquoi pas si notre voisin de gauche roule moins vite ! Zig-zag entre les motos au milieu du carrefour ? Après tout elles ne sont pas prioritaires.

S’arrêter pour laisser passer un piéton ? On le klaxonne, plutôt, pour lui signifier à distance qu’il faut qu’il s’écarte. Chercher une place de stationnement ? Certainement pas si on peut s’arrêter au milieu de la voie, en prenant bien garde de laisser un passage sur la gauche. D’ailleurs, il n’y a pas de parking pour les voitures. Attendre de bien voir pour doubler ? On avisera ensuite. Rouler à 130 sur une voie limitée à 90, ce n’est pas un problème pour les 4*4.

Finalement on est content de quitter le goudron, où l’on retrouve une piste défoncée par la pluie, où il faut slalomer entre les trous et les flaques, et où la vitesse est donc nécessairement réduite. Et c’est bien en brousse, finalement, malgré le pitoyable état des pistes, que l’on risque le moins.

Le gouvernement, bien sûr, pond des lois. Port du casque obligatoire, réduction des vitesses, ceintures obligatoires,… Le gouvernement, bien sûr, sensibilise à la sécurité routière. Casque = sécurité. Vitesse = danger. Garder la vie vaut mieux que garder la priorité.

Mais que faire quand le système est généralisé ? Que faire quand les lois et interdictions ne servent à rien, sinon à permettre à quelques policiers véreux d’imposer des amendes qu’ils ne reverseront pas à l’Etat, bien entendu. Le soir, ils iront boire une bière, et rentreront avec plus d’un gramme dans le sang en chevauchant une moto.

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